» Forum d'éducation et de sensibilisation des jeunes pour la gouvernance démocratique en RDC

Forum d'éducation et de sensibilisation des jeunes pour la gouvernance démocratique en RDC

Imprimer  

Excellence Monsieur le Ministre Lambert MENDE OMALANGA

FORUM D'ÉDUCATION ET DE SENSIBILISATION DES JEUNES POUR LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE EN RDC

COMMUNICATION DU MINISTRE EN CHARGE DE L'INITIATION À LA NOUVELLE CITOYENNETÉ

Mesdames et Messieurs les organisateurs de ce Forum,

Chers Participants,

La participation citoyenne des jeunes est un enjeu auquel le Ministère en charge de l'Initiation à la Nouvelle Citoyenneté consacre une attention particulière. C'est donc avec plaisir que je réponds à l'aimable invitation qui m'a été adressée pour participer à cet échange qui porte sur un sujet d’importance, car comme il a été si opportunément rappelé dans les termes de référence de ce forum, "la promotion de la Citoyenneté en République Démocratique du Congo est un impératif pour la réussite du système de gouvernance démocratique". On comprend tout naturellement le caractère central du thème qui m’a été proposé pour cette communication : "les jeunes et la Nouvelle Citoyenneté".

Pour renfoncer la participation citoyenne des jeunes, il est indispensable que ces derniers puissent être en mesure de "s'organiser et se structurer au-delà des regroupements parcellaires". C'est encore une expression heureuse tirée des termes de référence sus-évoqués.

Il faut dire que de telles organisations existent. Peut-être pas en nombre significatif, mais elles sont là. Chaque jour, le Ministère en charge de l’Initiation à la Nouvelle Citoyenneté reçoit plusieurs demandes de partenariat ainsi que des projets émanant d'associations de jeunes. Il faut dire que ces associations relèvent presqu'exclusivement d'une seule catégorie des jeunes, à savoir la jeunesse estudiantine. La raison en est peu être qu'en milieu académique, les jeunes partagent plus facilement les mêmes référentiels et ont plus ou moins le même emploi de temps. Il n’est pas rare toutefois que des jeunes exerçant un même métier ou appartenant à un même parti ou regroupement politique nous approche pour solliciter un accompagnement de leurs activités.

La question à ce stade est de savoir comment réunir des jeunes autour des mêmes idéaux éthiques et citoyens en dehors des regroupements catégoriels, professionnels ou politiques et des à ce jour ? Si ces échanges ouvrent des pistes pour ce faire, ils auront été d’un apport très positif à l’avancement de la cause des jjeunes générations et donc au devenir de notre société.

Pour évoquer la frange non scolarisée de la jeunesse, on ne peut ne pas penser tout de suite au grand défi qui l’assaille à travers le phénomène de la délinquance juvénile chronique couramment désigné sous le vocable de Kuluna. En effet, les jeunes désœuvrés sont également des citoyens à part entière de ce pays et doivent en tant que tels bénéficier d'une éducation à même d'assurer leur participation à la vie de la nation. Bien qu'aucune méthode définitive ne soit encore trouvée à ce stade dans la lutte contre ce fléau qui désole aussi bien les familles que l’ensemble de la communauté nationale, il me semble qu'il y a, par-delà les efforts des pouvoirs publics, un rôle pour la jeunesse elle-même pour aider à mieux comprendre ce phénomène afin d'y apporter les solutions les plus appropriées.

On peut considérer que s'il est vrai que les jeunes sont l'avenir de la Nation, c'est d'abord vrai les jeunes éduqués qui incarnent un apport positif compte tenu de ce qu’ils seront capables non seulement de peupler le sol congolais, mais aussi d'en assurer la grandeur, selon l'expression de l'hymne national.

Pour assurer demain e développement du Congo, les jeunes doivent déjà vivre le Congo-grand, c'est-à-dire se considérer comme fils et filles d'une nation qui surplombe les « géographicités » qui continuent malheureusement à plomber la généralisation d’une conscience nationale seule à même de porter un mieux-être pour tous. Voilà pourquoi un des objectifs du programme d'Initiation à la Nouvelle Citoyenneté consiste à redonner au peuple congolais une identité collective, une conscience politique et des valeurs qui cimentent la quintessence de la Nation. Autrement dit, il s’agit à travers ce volet de la politique gouvernementale de faire prendre conscience aux Congolais de toutes catégories et de tous les horizons de leur appartenance à une même communauté d'intérêt, les convaincre de la grandeur de leur pays et en faire des patriotes prêts à le défendre, et promouvoir la solidarité entre les différents segments de sa population, à quelque communauté qu’ils appartiennent.

C'est en vue de répondre à cette obligation citoyenne de concourir à assurer la grandeur du Congo que le Gouvernement, à la suite du Président de la République qui dans sa vision de la Révolution de la Modernité veut faire du Congo un vivier de la Nouvelle Citoyenneté, a décidé de faire prendre en charge par les pouvoirs publics l’effort de formatage du facteur humain, première ressource dont dispose la RD Congo, pour le rendre compatible avec le développement intégré et la révolution de la modernité. Ce concept doit être regardé comme le soubassement de l'action du Gouvernement pour le deuxième quinquennat de la troisième République. Principal acteur de cette révolution de la modernité, le Congolais se doit de cultiver le lien affectif qui existe entre lui et sa patrie et être prêt à en défendre les intérêts en toutes circonstances. Il

doit s’acquitter sans hésiter de toutes ses obligations civiques et s’engager volontairement dans des initiatives en faveur du bien-être collectif.

En d'autres termes, le Ministère de l'Initiation à la Nouvelle Citoyenneté se fonde sur le besoin de dépouiller le Congolais du "vieil homme". Celui-ci a eu plusieurs descriptions au fil du temps. La Conférence Nationale Souveraine le décrivit en ces termes : « ravalement et inversion des valeurs morales et spirituelles ; règne de l'arbitraire, de la concussion, de la corruption, du népotisme et du tribalisme ; détournement systématique des biens publics et spoliation des biens privés ; incivisme et anarchie, etc ».

La constitution du 18 février 2006 ajoute à cette liste l’injustice, l’impunité, le népotisme, le tribalisme et le clientélisme » (cf. Préambule de la constitution, paragraphe 3).

Nous engageons ainsi les jeunes à incarner un Congo différent en promouvant les valeurs que sont :

1. L’amour de la patrie ;

2. Le sens de responsabilité ;

3. L’honnêteté et l’intégrité morale ;

4. La discipline ;

5. L’esprit de solidarité ;

6. Le travail bien fait ;

7. Le caractère sacré de la vie humaine ;

8. Les droits et les libertés fondamentales ;

9. Le respect de la chose publique et de la propriété privée ;

10. La gouvernance démocratique reposant sur la participation ;

11. L'éco-citoyenneté.

Dans le cadre spécifique de la gouvernance démocratique, il faut souligner, entre autres, les valeurs que sont la tolérance, la capacité à accepter un point de vue contraire au sien, l'esprit pacifique et le fair-play.

La stratégie d'initiation à la nouvelle citoyenneté est tissée sur la promotion de ces valeurs et vise à atteindre un certain nombre d’objectifs notamment :

1. Sensibiliser efficacement les entités particulières qui composent le peuple Congolais afin qu’elles se sentent concernées par l’action des pouvoirs publics qu’elles sont appelées à inspirer, soutenir et contrôler ;

2. Familiariser les Congolaises et les Congolais avec les saines pratiques de promotion active de leurs droits fondamentaux, notamment le droit à la paix, à la sécurité, au bien-être, à la justice et tous les autres droits garantis par la Constitution de la République.

3. Inculquer à chaque citoyen des capacités de devenir un modèle de valeurs et un artisan de paix et de concorde nationale ;

4. Mobiliser l'énergie de tous contre la violence, l'injustice, l'impunité et les violations des droits et libertés ;

5. Amener les jeunes et les moins jeunes à rechercher l'excellence grâce à une organisation personnelle rigoureuse et au travail acharné et bien fait ;

6. Promouvoir le panafricanisme.

S'agissant des jeunes, le Gouvernement est préoccupé par la situation des jeunes enrôlés dans les groupes armés irréguliers que nous définissons comme forces négatives. Mon Ministère a organisé fin décembre 2012 à Beni, avec la collaboration d'une organisation des jeunes, un séminaire de sensibilisation des jeunes contre ce fléau.

En effet, outre le viol subi par plusieurs femmes du Kivu, il y a, entre autres abus des droits des personnes, l'enrôlement d'enfants parmi les forces négatives, principalement au sein du fameux M23, au motif qu'ils sont faciles à utiliser dans les combats ; faciles à manipuler ; qu'ils aiment l’aventure et assimilent rapidement les techniques de combat ; qu'ils ne s'intéressent pas au leadership et coûtent moins cher à ceux qui les emploient.

Je voudrais à cet égard engager les jeunes à dire non au phénomène enfant soldat, à refuser que dans notre pays les personnes n'ayant pas atteint leur majorité fassent partie d'une force ou d'un groupe armé. Il faut à cet égard se féliciter du fait que les FARDC ont procédé à la démobilisation des enfants soldats dont elles avaient hérité à travers les différents brassages et mixages avec d'anciens groupes armés rebelles. En marge de cet effort institutionnel, les jeunes sont appelés à se conscientiser les uns les autres pour éviter de faire le jeu des forces négatives qui endeuillent au quotidien des familles congolaises. S'il y a une action urgente que les jeunes doivent entreprendre, c'est bien celle qui consiste à se protéger eux-mêmes contre ceux qui, selon l'heureuse expression de l’artiste Jean Goubald, "leur volent leur jeunesse".

J'ai dit tout à l'heure que c'est sur la jeunesse éduquée que repose véritablement l'avenir de notre nation. On comprend dans cette perspective que la place des mineurs n'est certainement pas dans un groupe armé, mais à l'école ou dans un centre d’apprentissage de métiers. En déviant les enfants de ces structures qui sont les lieux où ils se préparent à leurs responsabilités futures, la conscription dans les groupes armés est non seulement illégale, mais également un abus aux droits de l'homme, car les enfants enrôlés dans les forces négatives sont soumis à des travaux qui excèdent leur âge et les filles à l'esclavage sexuel ou au mariage forcé.

Souvent peu formés, ils sont en fait de la chair à canon sans aucune perspective d’avenir.

La convention des Nations Unies sur les droits de l'enfance (Convention relative aux droits de l’enfant, 1989) et le Protocole facultatif de la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la participation des enfants aux conflits armés adopté par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 25 mai 2000 protègent les enfants contre la participation aux conflits armés. Le Protocole porte de 15 à 18 ans l’âge légal de la participation aux conflits armés et interdit l'enrôlement obligatoire dans les forces armées en dessous de 18 ans. En ce qui concerne l’âge auquel les forces armées nationales sont autorisées à procéder à l'enrôlement volontaire, le Protocole exige que les Etats fassent une déclaration au moment de la ratification et décrivent les mesures préventives qu’ils ont prises afin de veiller à ce que cet enrôlement ne soit jamais forcé, ni effectué sous la contrainte. Dire non à l'enfant soldat c'est exiger l'application par tous de ces instruments juridiques internationaux.

Ceux des jeunes ayant atteint la majorité qui se sentent la vocation du métier des armes peuvent se vouer à une belle carrière au sein des FARDC.

En parlant des enfants soldats, il est nécessaire de se pencher sur le contexte spécifique dans lequel ils sont enrôlés dans notre pays, à savoir celui de la guerre d'agression. Malgré les revendications identitaires et politiques servies pour dissimuler les pires forfaitures initiées à partir de l’étranger contre la RDC particulièrement depuis 1998, il n'est plus un secret pour personne que la RDC subit une agression qui participe d'un plan de sa balkanisation pour des mobiles hégémonistes et affairistes. Les initiateurs de cette agression ont eu beau jeu de multiplier les clichés de légitimation : le Congo « pays aussi étendu que toute l'Europe occidentale et aux ressources naturelles quasi inépuisables serait sans armée ni État digne de ce nom... », a déclaré sans rire l’initiateur en chef de l’agression contre notre pays à partir de son pays, à côté du nôtre. Pendant que des armes qu’il a fourni à ses tueurs fauchent les vies de nos concitoyens au Nord-Kivu en poussant des milliers des gens à l'errance avec toutes les incommodités qui s'en suivent, il a le c’incroyable culot d’affirmer aux quatre vents que les problèmes congolais ne proviennent pas de ceux qui nous agressent, mais toucheraient à la gouvernance, à la citoyenneté et à l'identité des tribus qui y habitent. C’est de la pure distraction et tous les jeunes qui aiment ce pays doivent la balayer comme l’ont fait dernièrement avec une rare lucidité la quasi totalité des acteurs de la communauté internationale.

Les jeunes doivent avoir à cet égard le meilleur éclairage qui soit. L'enjeu actuel au Congo est lié à la souveraineté de notre État et à la sauvegarde

de ses richesses. La déstabilisation de la RDC résulte d’un agenda délibérément élaboré et mis en œuvre par des groupes d’intérêts qui tentent de la sorte de pérenniser la cueillette sans contrepartie de nos ressources économiques. En faire une question essentiellement de politique intérieure, c'est fausser le débat et le biaiser. Ce qui ne signifie pas qu'il n'y ait pas des questions internes à régler, d'ailleurs il y en aura aussi longtemps que nous serons sur cette terre des hommes. Tout comme il y en a partout, y compris chez ceux qui nous agressent et chez leurs maîtres à penser. Il faut donc éviter les amalgames. Tout cela, les jeunes doivent en être conscients pour pouvoir assumer judicieusement les responsabilités qui les attendent demain.

Mais les jeunes ne valent pas que pour l'avenir qu'ils incarnent. Ils sont citoyens déjà aujourd'hui. Ils jouissent en conséquence les mêmes droits et devoirs que les autres citoyens. Notamment, pour les devoirs :

- Respecter la constitution et se conformer aux lois de la République (art.62 de la Constitution) ;

- Défendre le pays et son intégrité territoriale face à une menace ou à une agression extérieure (art.63 de la constitution) ;

- Faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la constitution (art.64 de la constitution) ;

- S’acquitter de ses impôts et taxes (art.65 de la constitution) ;

- Respecter et traiter ses concitoyens sans discrimination aucune (art.66 de la constitution) ;

- Protéger la propriété, les biens et intérêts publics et respecter la propriété d’autrui (art.67 de la constitution) ;

Les articles de la constitution qui épinglent les droits des citoyens sont plus nombreux. Ils s'étendent de l'article 11 à 61. Je ne les passe pas en revue ici étant donné qu'ils sont mieux connus, car souvent plus défendus que les devoirs.

Je voudrais terminer mon propos en revenant sur le thème qui m'a été proposé : les jeunes et la Nouvelle Citoyenneté. Vous l'aurez sans doute compris à travers mon exposé : les jeunes sont le premier levier de la nouvelle citoyenneté. C'est pour cela que le programme d'Initiation à la Nouvelle Citoyenneté leur consacre des modules particuliers intégrés à leur programme d'enseignement où adaptés à leur situation sociale. Nous appelons les jeunes sans distinction aucune à s'inscrire dans cette dynamique de restauration des valeurs, car nous ne pourrons bâtir la bonne gouvernance démocratique que sur celles-ci.

Je vous remercie.